Le samedi 14 septembre 2013 dans le cadre des Journées européennes du Patrimoine, l’APEV a programmé l’action suivante avec la collaboration de la Ville de Vailly :
– à 10 h 30 rendez-vous devant le monument à la mémoire du Dr Brocard, (angle des rue du Dr Brocard et rue des Jardinets) où une plaque fut posée de manière à informer les passants sur la raison d’être de ce monument :
– « Salle Culturelle », Place Bouvines, exposé de Jean-Pierre Boureux, président de l’Apev et historien, sur le docteur Brocard ainsi que sur un autre médecin de Vailly totalement ignoré de longue date dans notre bourg, le docteur Édouard Ancelet, né à Reims en 1828 et décédé à Vailly en 1891, célèbre en son temps pour ses publications scientifiques médicales.
Biographies et commentaires :
Docteur Brocard :
L’Ancien Régime et l’Église ont institué l’obligation de réserver un endroit dédié à l’ensevelissement des plus démunis, à l’intérieur du cimetière paroissial ou en un autre lieu de la paroisse. Les nouvelles normes d’hygiène apparues dans le même temps et qui vont se développer à mesure que les découvertes scientifiques croissent vont amener le législateur à isoler le cimetière du centre des agglomérations. Il en est ainsi à Vailly en 1829. À cette date les inhumations ne se feront plus que dans le cimetière actuel dans lequel on trouve donc des sépultures datant du second tiers de ce siècle et notamment celle des généraux d’Empire.
Cependant un médecin du bourg philanthrope et soucieux de la dignité des plus pauvres leur avait légué sa fortune, souhaitant être enterré en leur voisinage en un lieu réservé à l’origine pour les défunts dits de « la maison des pauvres vieillards » (cette « Maison des pauvres vieillards » n’est pas documentée par les archives, j’ai seulement trouvé dans l’inventaire de la série B aux AD Aisne qu’elle avait été réparée en 1787, mais ces archives font hélas partie de celles détruites lors du bombardement de Laon en 1940).
Ainsi, au-delà de la date de désaffection officielle de 1829, le docteur Brocard fut inhumé en 1847 dans ce cimetière de la rue des Jardinets où des Vaillysiens reconnaissants lui élevèrent le monument que l’on voit toujours aujourd’hui et que le Général Vignier décrivait comme « en bien mauvais état » vers 1920, dans ses « documents pour servir à l’histoire de Vailly-sur-Aisne » publiés en 1927. On ne s’étonnera guère outre mesure que 90 ans plus tard il soit toujours dans un état dégradé, mais non périlleux, après une légère consolidation en 2004 lors des travaux d’aménagement de la place.
À l’arrière de ce monument figurait la liste des donateurs et à l’avant une autre plaque portait le texte suivant : « Ci-gît M. Jean-Joseph Brocard Maître en chirurg(ie) à Vailly décédé le 18 juin 1847, âgé de 68 ans »
Le général Vignier ajoute encore que « son zèle pour la vaccine lui mérita une médaille du gouvernement royal », distinction pour laquelle je n’ai rien trouvé. Soucieux de son prochain ce médecin a rendu service aux plus démunis, nous pouvons lui en être reconnaissants et faire savoir qui il fut et ce qu’il fit. Dans ce but notre association a décidé de replacer une plaque sur le monument qui est dédié à la mémoire de ce médecin. La précédente étant devenue quasiment illisible puis détruite, nous avons opté pour un texte scientifiquement vérifié à partir de ce qui est disponible aux Archives départementales de l’Aisne.
Ainsi seul un Jean-Joseph Brocard né en 1752 et décédé à Vailly le 18 juin 1719 est mentionné. Il a épousé Marie-Claude Gabrielle Vroyet décédée avant lui et il est le fils de Joseph Brocard et de Jeanne Régnier. Ils eurent une fille, Marie-Claude, décédée le 29 novembre 1814 à l’âge de 33 ans.
Aucun Brocard n’apparaît plus après 1819 dans les registres paroissiaux des baptêmes, sépultures et mariages de Vailly. C’est pourquoi la date de 1847 notée par le général Vignier nous a semblé erronée et nous ne l’avons pas retenue. De plus le jour, le mois de décès ainsi que l’âge du défunt, en conformité totale avec l’acte de 1819 nous paraissent peu compatibles avec une autre personne qui présenterait ces caractéristiques. Nous ne pouvons cependant affirmer qu’un autre docteur Brocard, qui n’a pas eu d’existence dans l’état civil vaillysien n’ait jamais existé, encore faudrait-il en retrouver la trace assurée.
La place où se trouve le monument est aujourd’hui réduite en surface et l’implantation d’un cimetière, même de petite taille apparaît peu. Autrefois cet espace était plus vaste comme a pu le lire le général Vignier avant la disparition de cette liasse d’archives. Ainsi en 1787 le lieu était entouré d’une haie de 21 vieux ormes âgés de plus de 60 ans. Cette place ne figure pas sur le cadastre ancien de 1832 car il n’y a alors aucune construction dans cette zone extérieure aux remparts médiévaux.
Docteur Ancelet :
Édouard Ancelet, aujourd’hui complètement oublié à Vailly du fait que le général Vignier ne l’a pas mentionné dans notre seul ouvrage historique de référence, est né à Reims en 1828 dans un milieu familial ouvrier, son père étant ouvrier en laine et couvert de dettes ; la famille Ancelet a illustré historiquement la vie rémoise, un ancêtre fut en effet lieutenant général du conseil de Ville au XVIIe siècle.
Il fait ses études à Reims au Collège des Bons Enfants puis en 1849 on le trouve inscrit en première année préparatoire aux études médicales. Il fait ensuite le choix de Paris pour ses études et y soutient en 1856 une thèse sur l’anatomie pathologique du pancréas. En 1857soucieux de soutenir sa mère et de l’aider pécuniairement il choisit de s’installer avec elle dans notre bourg tout en conservant le célibat afin de ne pas apporter en dot à une femme un reliquat de dettes qu’il va du reste rembourser peu à peu. Il entre au conseil municipal en 1865 et rencontre au début de son installation à Vailly quelques déboires dus « à une propension native à la combativité » et à une grande probité intellectuelle orientée vers la promotion d’une République d’union et la recherche du progrès social par la science. Ces idées avancées, mais quelque peu éloignées de la réalité politique du moment lui valent momentanément un séjour à la prison de Soissons (1866).
Très vite il s’intègre au mieux à Vailly et s’affaire sans cesse auprès de ses patients dont il devient l’ami, quels que soient leurs opinions et leur milieu social. Un labeur acharné dans sa vocation et dans la recherche scientifique lui vaut d’être reconnu par des récompenses de l’Académie de médecine et de la société de chirurgie et dix-huit de ses publications paraissent à Paris, Lyon et Reims où la bibliothèque municipale Carnégie les conserve. Il s’intéresse également au sort des plus démunis et, en ce sens, critique, corrige et amende des projets de médecine sociale. Ainsi il présente au Conseil Général un « projet d’organisation de médecine gratuite des indigents » en 1862. Sur ce sujet il n’est pas d’accord avec le préfet et la lecture du texte montre qu’il sait sortir la langue de sa poche et qu’il ne connaît pas la langue de bois.
Sa mère décède en 1884 ce qui déstabilise cet homme sans famille. Lui-même s’éteint à Vailly le 5 janvier 1891 comme l’atteste l’acte de décès enregistré en notre ville ce même jour. L’Argus du Soissonnais n° 5 en date du 11 janvier 1891 relate sur trois colonnes la cérémonie d’obsèques et retranscrit les principaux discours d’hommages qui lui ont été rendus.
Sans aucun doute un nom à retenir parmi nos célébrités locales pour le cas où le Conseil municipal viendrait à réfléchir sur de nouveaux noms de désignation de rues par exemple.
A Vailly le samedi 14 septembre 2013, Jean-Pierre Boureux, président de l’A.p.e.v.
Article fort sympathique, une lecture agréable. Ce blog est vraiment pas mal, et les sujets présents plutôt bons dans l’ensemble, bravo ! Virginie Brossard LETUDIANT.FR
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